Paye,Social
Retraite
Retraite : c’est au tour du Rassemblement national de proposer de revenir sur la réforme Macron de 2023
Une proposition de loi présentée par le Rassemblement National (RN) visant à revenir sur la réforme des retraites d’avril 2023 a été déposée à l’Assemblée nationale le 18 septembre 2024. Comme celle annoncée et diffusée en juillet dernier par La France insoumise, elle vise à rétablir l’âge légal de départ en retraite à 62 ans. Mais elle prévoit en outre de ramener à 42 ans la durée d’assurance pour obtenir une pension de retraite à taux plein.
Une proposition de loi jugée recevable, mais au tout début de son parcours
La proposition de loi du Rassemblent National (RN) vise à revenir sur la réforme « Macron » entrée en vigueur en septembre 2023. Pour mémoire, cette réforme relève progressivement l’âge légal de départ en retraite de 62 à 64 ans, tout en accélérant le rythme de la hausse de la durée de cotisations requise pour une pension complète issu de la réforme Touraine de 2014.
Jugée recevable au bureau de l’Assemblée nationale le 18 septembre 2024, elle devrait être étudiée en commission avant une arrivée prévue dans l’hémicycle le 31 octobre, lors de la « niche » parlementaire du RN (source : AFP).
Politiquement, reste à savoir quel va être le sort de ce texte, dans le contexte actuel où aucun des grands blocs arrivés en tête aux dernières législatives ne dispose à lui seul de la majorité absolue à l’Assemblée nationale.
Pour mémoire, La France insoumise avait déjà annoncé en juillet dernier son intention de déposer également une proposition de loi visant à abroger la réforme Macron (voir notre actu du 25/07/2024, « Retraite à 64 ans : le Nouveau Front populaire entend revenir sur la réforme Macron de 2023 »).
À noter : l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pourrait également donner l’occasion aux partisans d’une abrogation de la réforme Macron de tenter d’y introduire des amendements en ce sens.
Rétablissement de l’âge légal à 62 ans pour les générations nées à compter de 1955
Rappel. - L’âge légal de départ en retraite est l’âge minimal à partir duquel un assuré justifiant d’au moins un trimestre d’assurance peut demander à liquider sa pension de vieillesse (c. séc. soc. art. L. 161-17-2).
En dessous de cet âge légal, il n’est en principe pas possible de prendre sa retraite, sous réserve des dispositifs permettant à certains assurés sociaux de bénéficier d’une retraite anticipée (ex. : « carrières longues »).
La réforme Macron des retraites d’avril 2023 a programmé le relèvement progressif de l’âge légal de départ en retraite de 62 ans à 64 ans (c. séc. soc. art. L. 161-17-2 et D. 161-2-1-9 ; loi 2023-270 du 14 avril 2023, JO du 15 ; décret 2023-436 du 3 juin 2023, JO du 4).
Ce qui est proposé. - Les députés RN proposent de rétablir l’âge légal de retraite à 62 ans pour les générations nées à compter de 1955 (proposition de loi art. 1, I, 1°).
Abaisser à 168 trimestres la durée d'assurance (42 ans) pour une pension à taux plein
Rappels. - Pour obtenir une pension de vieillesse de base à taux plein (50 %), les assurés doivent justifier, à partir de l’âge légal de départ, d’un nombre minimal de trimestres d’assurance (ou de périodes reconnues équivalentes), tous régimes confondus (c. séc. soc. art. L. 351-1 et R. 351-27).
Si l’assuré ne justifie pas du nombre de trimestres requis, le taux de la pension est affecté d’un coefficient de minoration (ou décote) (c. séc. soc. art. R. 351-27).
La durée d’assurance requise varie selon l’année de naissance de l’intéressé. La réforme des retraites d’avril 2023 a accéléré, à compter du 1er septembre 2023, le passage à une durée de cotisations à 43 ans (ou 172 trimestres) prévu par la réforme « Touraine » de 2014. Concrètement, avec la réforme « Macron », la condition de 172 trimestres doit s’appliquer à partir des générations nées en 1965 (c. séc. soc. art. L. 161-17-3 ; loi 2023-270 du 14 avril 2023, art. 10, JO du 15).
Passage à 168 trimestres. - La proposition de loi envisage d’abaisser à 168 trimestres (42 ans de cotisations) la durée de durée d’assurance nécessaire pour obtenir le taux plein pour les générations nées à partir du 1er janvier 1961 (proposition de loi, art. 2, I).
Selon l’exposé des motifs expliquant la mesure, il s’agirait de « garantir aux personnes éligibles au dispositif dit de ‘carrière longue’ de pouvoir bénéficier d’un départ réellement anticipé ainsi qu’à permettre le rapprochement de l’âge conjoncturel et de l’âge légal de départ en retraite pour les assurés relevant du droit commun ».
Âge d'attribution automatique du taux plein
À partir de 67 ans, les assurés nés à partir de 1955 bénéficient d’une pension au taux plein de 50 % même s’ils n’ont pas la durée d’assurance requise (c. séc. soc. art. L. 351-8, 1°).
Cet âge du taux plein automatique serait maintenu et correspondrait ainsi au « nouvel » âge légal (62 ans) + 5 ans (proposition de loi, art. 1, I, 7°).
Adaptation du dispositif de retraite anticipée carrière longue
Pour rappel, à certaines conditions, le droit à un départ anticipé avant l’âge légal de la retraite est accordé aux salariés qui ont commencé à travailler jeunes (c. séc. soc. art. L. 351-1-1).
La réforme des retraites d’avril 2023 avait modifié le dispositif en prévoyant, notamment, quatre bornes d’âge d’entrée (58, 60, 62 et 63 ans), et en parallèle, un âge de début d’activité apprécié par rapport aux bornes de 16, 18, 20, 21 ans.
La proposition de loi ne prévoit plus que deux bornes d’âges (au lieu de 4), et un âge de début d’activité au plus de 20 ans (au lieu de 21 ans) (proposition de loi art. 1, I, 5°).
Compte tenu de l’abaissement à 62 ans de l’âge légal envisagé, l’âge d’entrée dans le dispositif de retraite anticipée « carrière longue » (c. séc. soc. art. L. 351-1-1 A) serait abaissé d’au moins deux ans (au lieu d’au moins 1 an par rapport à l’âge légal de 64 ans) (proposition de loi art. 1, I, 4°, a).
La retraite progressive accessible dès 60 ans ?
Le dispositif de retraite progressive permet à un assuré à temps partiel de liquider provisoirement une partie de sa pension et de continuer à acquérir des droits à retraite au titre de l’activité à temps partiel. Une fois qu’il décide de liquider définitivement sa pension de retraite, cette dernière est recalculée compte tenu des droits acquis au titre de l’activité à temps partiel (c. séc. soc. art. L. 161-22-1-5).
Le texte prévoit que le dispositif de retraite progressive serait accessible à l’âge légal moins deux ans. Cela permettrait, comme c’était le cas avant la réforme d’avril 2023, une entrée dans le dispositif à 60 ans au moins (proposition de loi, art. 1, I, 4°, a).
Diverses adaptations liées à l’abaissement de l’âge légal envisagé
En cohérence avec la proposition d’abaisser l’âge légal à 62 ans, le texte prévoit que l’entrée dans le dispositif de retraite anticipée handicap lourd (c. séc. soc. art. L. 351-1-1 A et L. 351-1-3) pourrait avoir lieu à l’âge légal moins 7 ans (au lieu de 9 ans) pour maintenir une entrée possible à 55 ans (proposition de loi, art. 1, I, 4°, b).
La proposition de loi abrogerait le dispositif de retraite anticipée pour inaptitude qui avait été créé par la réforme d’avril 2023 (c. séc. soc. art. L. 351-1-5).
Pour mémoire, ce dispositif visait à garantir aux assurés reconnus inaptes au travail par la « sécurité sociale » de pouvoir partir en retraite à taux plein à 62 ans, avec un âge légal supérieur. Ce dispositif n’aurait plus lieu d’être avec un âge légal à 62 ans (proposition de loi, art. 1, I, 6°).
Serait également abrogée la surcote « parents » instaurée par la réforme d’avril 2023 (c. séc. soc. art. L. 351-1-2-1). Pour rappel, celle-ci est prévue pour s’appliquer à certains parents dont l'âge légal de départ en retraite est supérieur à 63 ans. Avec un âge légal envisagé à 62 ans, la surcote « parents » n’aurait plus d’objet (proposition de loi, art. 1, I, 6°).
Proposition de loi 284 enregistré à l’Assemblée nationale le 18 septembre 2024 https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/opendata/PIONANR5L17B0284.html