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Inaptitude

Inaptitude médicale : à partir de quand l’action en paiement des salaires est-elle prescrite ?

En cas d’inaptitude médicale, le salarié peut engager une action en paiement des salaires lorsque l’employeur ne respecte pas son obligation de reprise du salaire en l’absence de reclassement ou de licenciement. La Cour de cassation vient de préciser dans un arrêt du 7 mai 2024 que c’est la date d’exigibilité des salaires réclamés qui marque le point de départ de la prescription de l’action en paiement de salaire.

Rappel sur l’obligation de reprise du versement du salaire d’un salarié déclaré inapte

Lorsque, à l'issue du délai d'un mois à compter de la réception de l'avis médical d'inaptitude, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail, y compris en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail (c. trav. art. L. 1226-4 et L. 1226-11).

Lorsque le salarié estime que l’employeur n’a pas rempli son obligation en la matière, il peut exercer une action en paiement des salaires dus. Le délai pour engager une telle action est toutefois limité dans le temps.

Dans la mesure où il s’agit de salaire, l’action se prescrit par trois ans (c. trav. art. L. 3245-1).

Quelle est la date du point de départ de cette prescription ?

Pour la cour d’appel, le point de départ de la prescription de l’action en paiement des salaires débute un mois après la déclaration d’inaptitude

Dans cette affaire, une salariée occupant la fonction d’employée de pharmacie depuis le 1er août 1986 a été déclarée le 3 juillet 2012 inapte à son emploi par le médecin du travail.

L’employeur l’a licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 12 septembre 2013.

La salariée a saisi les prud’hommes d’abord en référé le 1er mars 2016 puis au fond le 3 novembre 2017 pour obtenir diverses sommes dont notamment le paiement des salaires d’août 2012 au 13 septembre 2013.

Toutes les demandes ont été refusées par les juges du fond qui ont estimé que celles-ci étaient prescrites. Pour les juges d’appel, le point de départ de la prescription de cette action en paiement débutait un mois après la déclaration d’inaptitude. La salariée aurait donc dû agir avant le 3 août 2015. Or la salariée avait saisi les prud’hommes le 1er mars 2016.

La salariée a porté alors l’affaire devant la Cour de cassation.

Pour la Cour de cassation, le point de départ de la prescription en paiement des salaires court à compter de l’exigibilité de chacune des créances salariales réclamées

La Cour de cassation censure la décision des juges du fond.

Elle rappelle le principe de reprise du salaire en l’absence de reclassement ou de licenciement du salarié déclaré inapte (voir ci-avant).

Elle rappelle ensuite que l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat (c. trav. art. L. 3245-1).

Elle en déduit que le délai de prescription des salaires court à compter de la date à laquelle la créance salariale est devenue exigible, et ce, jusqu’à la rupture du contrat de travail.

En d’autres termes, c’est la date habituelle du paiement des salaires réclamés en vigueur dans l’entreprise qui marque le point de départ de la prescription de l’action en paiement de salaire.

Par conséquent, toutes les demandes en paiement des créances salariales exigibles ici n’étaient donc pas prescrites.

L’affaire est donc renvoyée devant la même cour d’appel mais autrement composée.

Cass. soc. 7 mai 2024 n° 22-24394 FB