Vie des affaires
Bail commercial et sous-location
Une offre de coworking n’est pas une simple sous-location
Lorsque le titulaire d’un bail commercial sous-loue les locaux moyennant un loyer plus élevé que le sien, le propriétaire peut lui réclamer une augmentation en conséquence. Pour la Cour de cassation, le bailleur n’a pas cette possibilité lorsque le locataire propose en plus à ses clients un ensemble de prestations spécifiques.
Des prestations de coworking proposées par le locataire sans l’aval du bailleur
Une sous-location interdite par le bail. - Dans une affaire soumise à la Cour de cassation, le propriétaire d’un local d’activité de 2 232 m² comprenant une partie stockage d’environ 2 000 m² et une partie bureau le loue à une société.
Selon le bail commercial, le local doit servir exclusivement à usage de mise à disposition en libre-service auprès des entreprises et des particuliers de surfaces de petites dimensions modulables destinées à l'entreposage, le stockage ou l'archivage de marchandises, matériels ou consommables et accessoires destinés à l'emballage.
La sous-location est spécifiquement interdite sans le consentement du bailleur.
Or, le bailleur découvre que son locataire a affiché, à l’entrée de ses locaux un panneau indiquant « Bureaux à louer ».
Des loyers plus élevés perçus par le locataire pour ses prestations. - En l’espèce, le locataire conclut avec des tiers des contrats intitulés « prestations de services et mise à disposition de bureau », pour une durée d’un mois, renouvelable par tacite reconduction.
Ces contrats portent sur la mise à disposition de locaux équipés assortie de nombreuses prestations de services comprises dans le prix des bureaux en fonction de leur surface, telles qu'ameublement et entretien des locaux, chauffage, accès internet, téléphone, assurance, accès à des espaces partagés (réfectoire, kitchenette, salle de réunion, salle de détente, machine à café en libre-service gratuit, sanitaires), service d'accueil, surveillance et sécurisation des bâtiments.
Le bailleur rappelle donc à son locataire la destination des lieux prévue au bail et l’interdiction de sous-location.
Le bailleur obtient un réajustement de son loyer en appel. - Après avoir eu connaissance des conditions tarifaires pratiquées par le locataire pour sous-louer des bureaux, lesquelles sont plus onéreuses que celles de la location principale, le bailleur décide de demander en justice une augmentation du loyer correspondant au loyer des sous-locations.
Le bailleur obtient gain de cause devant les juges d’appel qui estiment qu’il s’agit bien d’une sous location puisque la mise à disposition des bureaux se fait de manière exclusive et sans limitation de temps et que les prestations offertes n’en sont que l’accessoire.
Contestant cette décision, le locataire se pourvoit en cassation estimant qu’il propose des de contrats de prestations de services et non de simples contrats de sous-location. Par conséquent, le bailleur ne peut lui réclamer d’ajustement de son loyer.
La mise à disposition de bureaux avec prestations n’est pas une sous-location
Un prix global incluant des prestations déterminantes pour les clients.- Dans cette affaire, la Cour de cassation écarte la qualification de contrat de sous-location et censure la décision des juges d'appel.
La Cour précise que la qualification de sous-location, au sens de l'article L. 145-31 du code de commerce, est exclue lorsque le locataire met à disposition de tiers les locaux loués moyennant un prix fixé globalement, qui rémunère indissociablement tant la mise à disposition des locaux que des prestations de service spécifiques recherchées par les clients.
Or, dans cette affaire, la redevance fixée globalement rémunérait indissociablement, à la fois la mise à disposition de bureau équipés et les prestations de services.
Pas d’augmentation du loyer pour le bailleur. - La Cour de cassation souligne que les prestations sont spécifiquement recherchées par les clients du locataire.
Dès lors, la cour d’appel ne pouvait considérer ces prestations comme un simple accessoire de la location des bureaux, et donc assimiler ces contrats à de simples sous-locations.
Dans ce cas, le bailleur n’est donc pas en droit de réclamer d’augmentation corrélative de son loyer.
Pour aller plus loin : « Le bail commercial », RF 2022-2, § 278
Cass. Civ., 3e ch., 27 juin 2024, n°22-22823 et 22-24046